Afin de soutenir la croissance des TPME, le CESE recommande l’adoption d’un «Small Business Act» et l’accélération de la mise en œuvre d’un dispositif de financement et d’accompagnement dédié à cette catégorie d’entreprises.
Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) publie les résultats de son étude sur les micro, très petites et petites entreprises au Maroc.
Cette étude met en évidence le rôle des micro/TPE/PE dans le tissu entrepreneurial national, tant par leur poids démographique que par leur contribution sociale à l’emploi. Elle examine également les principaux défis auxquels ses entreprises sont confrontées.
Des fragilités structurelles
Les micro, très petites et petites entreprises (micro/TPE/PE) représentent plus de 98% des entreprises formelles dotées de la personnalité morale et assurant 56% des emplois déclarés dans le secteur privé. Cependant, les impacts économiques générés restent en deçà des attentes en termes de création de richesse et de contribution aux dynamiques productives.
L’étude révèle que ces entreprises rencontrent d’importantes difficultés dans leur processus de croissance, de modernisation et d’intégration dans les chaînes de valeur. En témoigne le taux de transition vers des tailles supérieures qui se situe à des niveaux très faibles: entre 2017 et 2022, 0,2% seulement des micro-entreprises ayant évolué vers le statut de TPE ou PE. Les mouvements de régression restent également fréquents, particulièrement en période de crise, avec près de 15 658 défaillances enregistrées en 2024, presque toutes concernant des TPE.
En dépit des réformes initiées par les pouvoirs publics, il est constaté que ces entreprises continuent de faire face à de multiples obstacles, limitant leur capacité à se transformer en véritables moteurs de développement.
De fait, une part importante de ces entreprises pâtit de carences manifestes en matière de capital humain, de capacité de gestion, de planification et de propension à l’innovation. Un nombre important de porteurs de petits projets se lancent dans l’entrepreneuriat par nécessité plutôt que par opportunité, avec une utilisation encore limitée de l’outil digital et une forte dépendance au marché local.
Difficulté de financement
Les plus petites structures peinent à accéder au financement, tandis que les startups ne trouvent pas toujours des dispositifs adaptés à leurs besoins. Quant à l’accompagnement non financier, pourtant essentiel pour renforcer leurs compétences et leur compétitivité, il demeure fragmenté et peu développé.
À ces fragilités internes s’ajoutent des contraintes structurelles liées à l’environnement externe. Un accès aux marchés encore très restreint, qu’il s’agisse de la commande publique, de l’exportation ou de l’intégration avec les grandes entreprises. La concurrence déloyale de l’informel pèse fortement sur leur activité, de même que les lourdeurs procédurales. En outre, la confiance vis-à-vis de l’administration fiscale reste fragile, malgré les efforts entrepris en matière de digitalisation, de simplification et de transparence des procédures.
Un cadre juridique inadapté
Les délais de paiement constituent une charge supplémentaire déterminante pour la trésorerie de ces entreprises. Enfin, le cadre juridique en vigueur ne répond pas suffisamment aux besoins et aux spécificités de ces entreprises, en particulier des startups.
Des mesures pour renforcer la résilience des micro/TPE/PE
Le CESE considère que les micro/TPE/PE nécessitent une approche intégrée, combinant le renforcement de leurs capacités internes et l’amélioration de leur environnement externe. Afin de renforcer leur résilience et soutenir leur croissance, le Conseil recommande notamment de:
– Regrouper l’ensemble des dispositifs de soutien des micro/TPE/PE au sein d’un cadre normatif unique, en accélérant la mise en place du «Small Business Act».
– Confier à une instance nationale indépendante la mission de suivi et d’évaluation des politiques publiques en faveur des micro/TPE/PE.
– Assurer un déploiement territorial des mesures en mettant en place, en particulier, une cartographie nationale des besoins régionaux, aux fins de garantir la cohérence et l’efficacité des dispositifs.
– Élargir l’offre de formation destinée aux porteurs de projets, en impliquant un réseau élargi d’associations d’entrepreneurs, sur la base de cahiers des charges précis.
– Intégrer le développement des compétences entrepreneuriales et managériales dans les cursus scolaires et dans ceux de la formation professionnelle à compléter par des stages d’immersion en entreprise.
– Renforcer l’accès au financement en tenant compte des spécificités de chaque catégorie d’acteurs, notamment en accélérant la mise en œuvre du dispositif de soutien dédié aux petites et moyennes entreprises.
– Mettre en place un plan national intégré d’accompagnement non-financier, structuré autour du Small Business Act, combinant services de proximité, partenariats avec des acteurs qualifiés et formats modulables de soutien.
– Faciliter l’intégration des micro/TPE/PE dans les chaînes de valeur et leur accès à des marchés plus larges, en favorisant les alliances stratégiques et la mise en réseau, tout en élargissant leur accès à la commande publique via des quotas différenciés par taille et des mécanismes de co-traitance.
– Poursuivre l’assainissement de l’environnement des affaires en renforçant la lutte contre la corruption, en particulier le volet coercitif, en agissant contre la concurrence déloyale de l’informel et en accélérant la simplification et la digitalisation des procédures.
– Procéder à une évaluation à mi-parcours de la réforme fiscale en cours, afin d’en mesurer les effets sur les micro/TPE/PE et d’apporter les ajustements nécessaires dans l’optique d’alléger la charge pesant sur les plus petites unités, tout en renforçant la confiance entre l’administration fiscale et ces entreprises.











